[QUESTION] Que faites-vous dans vos laboratoires de Saint-Sauveur ?[REPONSE] Pour l'essentiel, nous faisons de la sélection variétale. Sur 100-francs investis, 10 % environ va la recherche génétique et 85 % à la sélection «classique». Nous développons de nouvelles lignées qui, après croisements, deviendront des hybrides. Pour le maïs par exemple, on développe et on teste 35.000 lignées par an. Mais les hybrides commercialisés sont rares, de l'ordre de quelques exemplaires. Plus de la moitié de ce que nous vendons en Europe, en Afrique et au Moyen Orient, provient de France, en particulier du Sud-Ouest. Nous tenons à cette implication citoyenne dans un terroir où nous avons investi 100-millions de francs depuis cinq ans. Il nous ressemble. A Novartis Seeds, nous avons le culte de l'absence d'arrogance.[QUESTION] Quels sont les futurs enjeux pour les semenciers ?[REPONSE] C'est grâce à la semence qu'on va apporter aux agriculteurs, aux transformateurs et aux consommateurs des produits respectant davantage l'environnement. Il y a 10 ans, pour traiter certaines maladies du blé, il fallait appliquer 3 kilos de fongicide à l'hectare. Quelques grammes suffisent aujourd'hui. Il faut faire jouer à la semence le rôle de vecteur pour une plus grande sécurité du métier de l'agriculteur et, surtout, de notre alimentation. Volume, qualité, régularité, voilà nos enjeux. On peut tendre vers une agriculture productive mais qui, néammoins, raisonne l'utilisation d'engrais et de produits phytosanitaires. Une agriculture plus écologique.[QUESTION] Les biotechnologies seront évoquées, demain, lors d'un débat. Quel est, à ce sujet, votre sentiment ?[REPONSE] C'est un outil supplémentaire à la disposition des sélectionneurs pour développer des variétés de semences plus productive, plus respectueuses de l'environnement. A l'époque, les conditions d'un débat serein et d'une mise en valeur de ces techniques n'étaient pas réunis en France. C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas commercialisé de produits cette année. Novartis Seeds a été à l'origine du groupe de travail qui a réfléchi à la création d'une filière sans OGM. Dès le départ, nous avons prôné la transparence en décidant d'étiqueter nos sacs pour favoriser la traçabilité. Aujourd'hui, nous demandons la création d'une agence européenne unique de sécurité alimentaire. C'est la seule façon de redonner confiance aux consommateurs. Aujourd'hui, je continue de penser que les conditions d'un débat serein ne sont pas réunies car nous sommes au milieu d'une guerilla médiaticopolitique. Propos recueillis par Serge BARDY.
[QUESTION] Vous allez vous exprimer sur les OGM. Quelle est la position du gouvernement ?[REPONSE] Il faut aborder ce débat avec raison et lucidité. La position du gouvernement français, c'est ni d'accepter tous les OGM sans précaution, ni de fermer la porte à tout progrès. Je n'ai aucun à priori favorable sur les O. G. M. Mais si demain on invente un blé génétiquement modifié capable de pousser dans les contrées arides et de résoudre les problèmes de faim dans le monde pourquoi le refuser. Cela dit, il y a deux incontournables : d'une part la transparence et l'information du consommateur par l'étiquetage. Il doit pouvoir identifier si le produit qu'il achète vient d'une filière OGM ou non OGM. D'autre part, l'application du principe de précaution maximum lorsqu'il n'y a pas de certitude scientifique absolue. Nous le devonss impérativement à la sécurité alimentaire de nos concitoyens.[QUESTION] Vous allez aborder les discussions de l'organisation mondiale du commerce (OMC) qui s'annoncent tendues ?[REPONSE] L'OMC n'est pas un mal en soi. Elle permet de réguler les échanges mondiaux et fait preuve d'un professionnalisme sérieux. Sur les onze derniers arbitrages elle a condamné 5 fois les Etats-Unis, les a déboutés deux fois pour 4 condamnations à l'égard de l'Europe. L'OMC n'est donc pas à la solde des USA. Mais le modèle agricole et alimentaire européen qui met en avant la sécurité, la transparence, la qualité doit être pris en compte. Le buf aux hormones est très édifiant En maintenant l'embargo, l'Europe unie et solicaire défend la sécurité alimentaire de ses populations et a engagé un rapport de force sur un principe fondamental.[QUESTION] Le monde agricole est sous tension, les manifestations se multiplient. Quelles réponses pouvez-vous apporter ?[REPONSE] Contrairement à ce que dit Luc Guyau, je n'ai jamais dit que tout allait bien. Il ne devrait pas se livrer à ce genre de caricatures. Le porc, les volailles, les fruits et légumes, le lait, affrontent une crise à laquelle la solidarité nationale apporte des réponses ponctuelles. Mais on ne coupera pas à des réformes structurelles dans certains secteurss qui orientent la production vers une maîtrise qualitative et quantittative des productions, sinon, on retombera chaque année dans ces crises.[QUESTION] Ne craignez vous pas une surenchère syndicale entre la FDSEA et la Confédération ?[REPONSE] C'est en effet un risque, mais cela fait partie du jeu syndical et de la vie politique.[QUESTION] On voit émerger une alliance nouvelle entre paysans et consommateurs ?[REPONSE] Il est bon de renforcer ces liens et ces partenariats mais il ne sert à rien de désigner des boucs émissaires. Que s'instaurent de profonds liens de partenariat et une coopération intelligente entre tous, producteurs, industriels, distributeurs consommateurs et les filières n'en seront que plus renforcées. Recueilli par Pascal JALABERT.