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Propos recueillis par Marc DEJEAN.

[QUESTION] «La Dépêche du Midi».- Vous participiez, ce samedi, à Rodez, à un débat de la CGT sur les droits des salariés. Or, nombreux sont les représentants de la Confédération paysanne affirmant que «leur liberté syndicale est bafouée».[REPONSE] José Bové.- En fait, les paysans n'ont pas le droit de grève car il n'est pas question pour eux d'arrêter de traire par exemple. Notre seule façon de pouvoir nous opposer à telle ou telle décision passe donc par des manifestations publiques. En réponse à cela, on subit de plus en plus souvent des répressions et des mises en examen. Mais curieusement, on constate aussi qu'il y a deux poids, deux mesures. Chaque action de la Confédération donne lieu à des poursuites judiciaires, ce qui n'est pas le cas de la FNSEA lorsqu'elle détruit des bâtiments publics, démonte des rails ou saccage des supermarchés. Par ailleurs, on assiste de plus en plus souvent à une volonté des tribunaux d'attaquer les syndicats en tant que personne morale au lieu de chercher les coupables. C'est une dérive dangereuse, comme celle consistant – ce fut le cas avec l'affaire du McDo de Millau – à utiliser un système de rançon pour mettre les gens en liberté. Initialement, les cautions avaient surtout un sens pour les délits financiers.[QUESTION] - Avec d'autres, vous êtes actuellement concerné par deux affaires à la suite de vos actions contre le riz et le maïs transgénique. Où en sont ces dossiers?[REPONSE] - Pour le riz au CIRAD de Montpellier, l'instruction devrait être close d'ici dix, quinze jours. On verra donc bientôt les conclusions du juge. Pour le maïs de la RAGT à Druelle, l'instruction vient de débuter et nous sommes une vingtaine à avoir été entendue par les gendarmes. Là aussi, on attend de voir quelle sera l'attitude de la justice mais on ne sait même pas, actuellement, si la RAGT est ou non partie civile.[QUESTION] - Des rumeurs circulent à propos de tensions croissantes au sein de la Confédération.[REPONSE] - Alors là, je vais être très clair. Il s'agit d'intox pure et simple. Il n'y a aucun problème à l'intérieur de la Confédération, ni en Aveyron ni au niveau national. Il y a, au contraire, une parfaite entente sur le rôle de chacun. Je suis une sorte de haut-parleur de l'ensemble du mouvement, sans anicroche aucune avec François Dufour, porte-parole national. Petite anecdote à ce propos, nous avons lui et moi, pour des raisons d'économie, partagé le même lit – très grand il est vrai – à Seattle, ce qui aurait été impossible s'il existait des tensions entre nous (rires). En revanche, la réalité, ce sont des propos diffamatoires sur ma personne qui circulent à travers l'Aveyron et ailleurs, et dont l'origine est à chercher du côté du conseil général, de la FNSEA et du CNJA...[QUESTION] - A quoi faites-vous allusion?[REPONSE] - Je pense notamment à ce membre du cabinet de Jean Puech qui a dit qu'en 1987, j'avais été chez Kadhafi, en Libye. Ce qui est incroyable, c'est que j'ai retrouvé cette allégation sur des tracts abandonnés dans des WC à Seattle et rédigés par des marchands de viande américains. Le problème, c'est que je n'ai pas de preuve formelle de l'origine de cette fausse information. Par contre, je vais porter plainte pour diffamation à la suite de la parution d'un texte intitulé «Le saviezvous ?» dans le journal de la FDSEA et du CDJA de la Mayenne. Laissant entendre qu'il s'appuie sur les confidences d'un ancien président des Jeunes Agriculteurs aveyronnais – Jacky Foissac m'a assuré que c'était faux et je le crois – cet article réécrit ma biographie. On y apprend qu'un de mes grands-pères était armateur et trafiquant d'armes (ils étaient poissonnier et marchand de fleurs), que j'ai été condamné à neuf ans de prison avec sursis pour avoir incendié deux chars sur le Larzac et que j'ai détourné une partie de ma caution pour amasser une fortune personnelle (il allume sa pipe et sourit) ![QUESTION] - A croire que vous êtes l'objet d'une campagne de déstabilisation?[REPONSE] - Il y a en tout cas une volonté manifeste de nuire. On s'attendait un peu à cela dès le début mais là, ça continue de plus belle. Le baratin sur d'hypothétiques dissensions au sein de la Confédération est du même tonneau.[QUESTION] - Il n'est peut-être pas anodin de rappeler que les prochaines élections à la chambre d'agriculture ont lieu dans un an. Etesvous prêt à assumer vos responsabilités jusqu'au bout et à prendre, le cas échéant, les commandes?[REPONSE] - En 1983, nous avions fait 15% des voix, 20% en 1989 et 31% en 1995. Notre objectif, en tant que Confédération paysanne, c'est qu'un maximum de paysans se reconnaisse dans notre discours. Bien sûr, quand on va à des élections, c'est pour faire des voix et si une majorité de paysans nous accorde ses suffrages, nous assumerons alors nos responsabilités, toutes nos responsabilités. Mais sûrement pas juste pour nous glisser dans les habits du président de la chambre. Notre volonté est de ramener la réflexion au plus près du terrain, de permettre aux paysans d'être maîtres de leurs choix en Aveyron en se réappropriant cet organisme consulaire. Nous proposerons de tout remettre à plat en organisant un vaste débat dans chaque commune, chaque canton pour savoir ce qu'ils veulent.[QUESTION] - Depuis l'été dernier, on se demande parfois comment vous faites pour gérer votre emploi du temps tout en vous occupant encore de vos brebis.[REPONSE] - Je travaille en GAEC et la Confédération paysanne a financé mon remplacement jusqu'à l'automne dernier et le sommet de Seattle. Le 3-janvier, j'ai pris la décision, en accord avec mes associés, de réduire mon temps de travail et je viens de passer à mi-temps afin d'être plus disponible pour la Confédération. Mais je ne me transforme pas en professionnel et je suis avant tout un paysan syndicaliste...

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